À l’approche des fêtes, Montpellier revêt ses habits de lumière et, dans l’intimité de quelques foyers se perpétue une coutume savoureuse : les fameux treize desserts de Noël.
Au-delà des illuminations et des marchés de Noël, cette tradition méditerranéenne des treize desserts illustre à merveille l’esprit de convivialité et de tradition qui animait autrefois la ville et ses habitants et qui l’anime encore parfois.
Alors amis gourmands, laissez-moi vous proposer, en cette veille de Noël où vous êtes certainement en train de faire vos derniers achats, un voyage entre gourmandise, héritage culturel et symbolique spirituelle !
En route pour la découverte de cette belle tradition gourmande. En route donc pour la découverte de ces fameux treize desserts.
Une histoire aux multiples saveurs
En Provence et jusque dans le Languedoc, la coutume des treize desserts s’est souvent transmise de génération en génération. À Montpellier, ces douceurs étaient autrefois présentes sur quasiment toutes les tables durant la période de Noël, reflétant ainsi le permanent brassage culturel de la ville. Mais ici point d’obligations… sauf une… En effet, chacun pouvait y adapter la liste des desserts selon ses envies, du moment que le nombre 13 était respecté.
Pourquoi treize desserts ? Et pourquoi pas quatorze ? Ou même quinze ! C’est vrai, quand on aime on ne compte normalement pas… Surtout quand il est question de sucreries !
Treize ! Pas un supplémentaire ! Un de plus, ce serait un sacrilège !
Treize desserts, tout simplement, pour faire écho au Christ et à ses douze apôtres, ni plus, ni moins. Cela est tout à fait normal car Noël était pendant très longtemps une fête religieuse et trouve ses origines dans la célébration de la naissance de Jésus Christ !
D’ailleurs ces treize desserts se dégustaient après le retour de la messe de minuit. Il aurait été inconcevable que quelques mains baladeuses s’aventurent trop près de ces tentations juste avant cette célébration.
Une table dédiée à la Trinité
Lorsque l’on célèbre ces treize desserts, on ne fait pas les choses à moitié !
La tradition veut qu’une table spécifique soit dressée pour recevoir ces treize desserts. Elle doit être recouverte de trois nappes superposées. La maîtresse de maison, et uniquement elle, même si la maison est assez riche pour avoir des domestiques, place d’abord la plus grande nappe, puis une moyenne et enfin la plus petite, et à l’issue de ce cérémonial, elle relève les angles afin que les esprits malins ne puissent s’y agripper et, depuis ce belvédère, jeter un sort à la famille assemblée… A la suite de tout cela, elle orne la table de trois chandeliers, en référence à la Sainte-Trinité.
Elle y dispose également trois coupelles de graines germées – si possible de blé, lentilles et cresson – afin d’appeler la prospérité et la fertilité pour la maison et tous ceux qui y vivent. Ces petits détails, tout comme la crèche qui était souvent réalisée dans le voisinage de cette table, créent une ambiance chaleureuse qui met tout le monde dans l’esprit de Noël dès le premier coup d’œil.
Les incontournables « mendiants » et fruits secs
Au cœur de cette tradition des treize desserts, on retrouve tout d’abord les fameux mendiants, c’est-à-dire le quatuor traditionnel de fruits secs qui ont toujours tenu le premier rôle sur la table de Noël.
À l’origine, il ne s’agit pas encore de ces disques de chocolat garnis de fruits séchés ou confits que l’on trouve aujourd’hui chez tous les chocolatiers. Ils n’étaient alors que de simples fruits secs, tous porteurs d’un sens religieux.
La noisette représente les Augustins, la figue séchée, les Franciscains, l’amande, les Carmes et le raisin sec, les Dominicains. De quoi régaler les amateurs de symbolisme !
Ensuite viennent les dattes, clin d’œil évident à l’Orient, terre de naissance du Christ.

Ces fruits secs sont souvent les premiers à être dégustés, comme un clin d’œil à leur importance. On peut également les accompagner des nougats blanc et noir qui, eux aussi, renvoient aux différentes confréries de pénitents, prolongeant encore un peu plus le lien entre religion et gourmandise.
De la pompe à l’huile à la fougasse d’Aigues-Mortes
Dans le cortège des douceurs, une place de choix est réservée à la pompe à l’huile, cette brioche parfumée à l’huile d’olive qui se rompt à la main. Jamais au couteau ! Tout comme d’ailleurs le pain dans la tradition chrétienne.
Dans la région de Montpellier, la pompe est parfois remplacée par une fougasse, si possible d’Aigues-Mortes, pour profiter de sa texture moelleuse et de sa légère saveur parfumée à la fleur d’oranger et agréablement sucrée.
Les fruits frais, un complément nécessaires
Pour colorer la table et ajouter une touche rafraîchissante, on y glisse souvent des oranges, des clémentines, et parfois même un melon d’eau conservé précieusement depuis la fin de l’été. Dans certains ménages, on y ajoute des pommes et des poires d’hiver, quitte à tomber sur quelques variétés un peu rugueuses ! Mais qu’importe, tant qu’on atteint le chiffre magique de treize !

Les spécialités montpelliéraines
À Montpellier, la tradition se nuance de quelques délices locaux, comme le nougat des capouchins qui sont en fait une figue sèche fourrée d’éclats de noix.
Il y a aussi le fameux sauva-chrestian (ou « sauve-chrétien »), ces grains de raisin macérés dans un flacon d’eau-de-vie à l’abri de la lumière, attendus patiemment jusqu’à Noël. Les plus petits avaient parfois le privilège d’y goûter, provoquant rires et étonnements sous l’œil amusé des aînés.
Les treize desserts, un moment de partage
Les treize desserts de Noël ne sont pas qu’un simple étalage de gourmandises : ils représentent une tradition culturelle du sud et un esprit festif si chers au cœur des Languedociens. Que vous suiviez la recette à la lettre ou que vous choisissiez de composer avec les produits locaux, n’oubliez pas que l’important est de se rassembler autour d’une table agréablement décorée et de partager un instant de complicité.
A tous, de joyeuses fêtes de Noël !
Et à demain…
Pour aller plus loin, bibliographie et liens
Poli Brigitte, 2002 .- Les treize desserts provençaux : Une coutume en mouvement .- Montfaucon, Librairie contemporaine .- 61 p.
Article “Les Treize Desserts” – Wikipedia
4 commentaires
Galière
Merci pour ce partage. Une bien jolie traduc
David Solange vdaid
Fabrice merci pour ce partage sur les traditions de Montpellier
Je pense ue la fougasse d’ aigues mortes est depuis peu dans les treize desserts c’est du moderne 😂😉
Passez de bonnes fêtes et encore merci
Oscar
Les 13 desserts sont tous délicieux. Et il n’est pas question ici de faire ” le bon apôtre ” !
L’expression ” Faire le bon apôtre ” est une référence à Judas, l’apôtre qui trahit Jésus dans la Bible. Celui-ci fit croire en sa bonté d’âme et en ses bonnes intentions en faisant preuve d’hypocrisie.
RprRoy
Merci merci de ce delicieux partage giurmand. Beau Noël. Amitiés