Beaucoup d’entre nous connaissent le Musée du Désert et ont pu découvrir l’intérêt de ses collections. Les divers objets qui sont présentés dans la vingtaine de salles qui le composent nous racontent l’histoire des protestants français, de la Révocation de l’Edit de Nantes jusqu’à la Révolution. Ils nous racontent aussi celle de ces huguenots cévenols, ces fameux camisards qui osèrent résister à Louis XIV et dont la révolte, s’acheva, au tout début du XVIIIème siècle dans un bain de sang ou par l’envoi aux galères.
Ce Musée du Désert est installé dans la maison natale du chef camisard, Pierre Laporte dit Rolland, située au hameau de Soubeyran, sur la commune de Mialet. Depuis 1880, cette demeure, maintes fois accrue, est la propriété de la Société de l’histoire du protestantisme français et c’est en 1911, grâce à l’engagement d’Edmond Hugues et Franck Puaux, que le musée ouvre ses portes au public.
Dans le cadre de l’aménagement d’un premier musée, ils bénéficient du concours d’un architecte montpelliérain bien connu de la plupart des membres du groupe “Montpellier Histoire Patrimoine”, Edmond Leenhardt (1870-1950).
Cet architecte, diplômé de l’Ecole des Beaux-Arts de Paris, autorisé à cosigner la façade du Petit Palais à Paris, et auteur de plusieurs édifices remarquables, notamment l’Institut Bouisson-Bertrand, en face de l’entrée principale de la faculté de médecine, appartient à la très grande bourgeoisie protestante montpelliéraine. Ses ancêtres et ses parents avaient su diversifier leurs activités dans de très nombreux secteurs d’affaires, notamment la banque et l’industrie. De plus, durant cette IIIème République, son nom est également connu dans le monde de l’art, avec Max(imilien), qui s’est évertué à rendre hommage aux victimes protestantes de l’absolutisme, notamment avec son tableau “les prisonnières de la Tour de Constance”, mais aussi de la théologie, avec Franz (1846-1922), professeur de théologie à la faculté protestante de théologie de Montauban.
C’est donc tout naturellement, qu’Edmond Leenhardt travaille en 1912 à ce vaste projet qui consiste à donner un site de commémoration de l’histoire du protestantisme au coeur même de cette terre si chère aux descendants de réformés.
Le plan qui nous sert d’illustration fut longuement conservé par Simone Cauquil et qui, à nos côtés, et aux côtés d’Alain Gensac et Laurent Dufoix, avait travaillé à l’élaboration de l’exposition sur Edmond Leenhardt inaugurée en 2007 au Pavillon Bagouet.
Sur ce document, il est intéressant de remarquer qu’Edmond Leenhardt fait du “Leenhardt”…
On y retrouve sa stylistique, son vocabulaire, fort éloigné du caractère rustique de l’ancienne ferme de Rolland. L’architecte propose de la magnifier avec des garde-corps constitués de balustres en forme de poires, d’étirer les ouvertures vers le haut afin de leur donner l’image de grands baies romanes, dignes d’église. Il propose également de placer sous les corniches de larges bandeaux, sur lesquels devaient être portés des psaumes à l’intention des visiteurs. De plus, il coiffait l’ensemble de ses toitures à larges débords que l’on peut retrouver sur plusieurs autres maisons ou communs agricoles qu’il construisit, dont les plus connus sont ceux de Piedmarche.
Edmond Leenhardt ne fut pas suivi en tous points sur ce projet ; et heureusement.
Il oeuvra aussi à l’aménagement des salles, n’hésitant pas à les parer de puissantes colonnes, qui pouvaient apparaître comme le reflet de la force de la foi protestante, mais également comme celui de la puissance acquise par cette société protestante durant cette Troisième République.
Aujourd’hui à la faveur d’un réaménagement, le décor a été bien épuré, voire même aseptisé.
Les logiques changent… L’image que souhaite dévoiler d’elle-même la communauté protestante également.
Aujourd’hui le musée du Désert est labellisé par le Ministère de la Culture, “Maison des Illustres.