Bouzigues : Un écrin patrimonial à moins d’une heure de Montpellier

Située sur les rives nord de l’étang de Thau, à environ 40 minutes de Montpellier, la charmante bourgade de Bouzigues invite à la découverte d’un riche patrimoine culturel et naturel. Connue pour sa conchyliculture et ses paysages pittoresques, Bouzigues s’inscrit comme une destination incontournable pour les amoureux du patrimoine héraultais et des bonnes tables. Entre histoire millénaire et traditions maritimes, le village séduit par son authenticité et son caractère convivial.

Les Premiers Habitants de Bouzigues : Des Bergers aux Pêcheurs

Les premiers habitants du territoire, aujourd’hui connu sous le nom de Bouzigues, semblent avoir été des bergers. Ces premiers colons faisaient paître leurs troupeaux dans la garrigue, encore sauvage et indomptée. Au fil du temps, des pêcheurs semi-sédentaires s’installèrent sur les rives de l’étang de Thau. Pendant la saison estivale, ces pêcheurs nomades migraient vers la mer, vivant sous des tentes pour profiter des eaux poissonneuses de la Méditerranée. À l’approche de l’hiver, lorsque les tempêtes menaçaient, ils retournaient à l’abri des eaux plus paisibles de l’étang.

Ces premiers pêcheurs trouvèrent refuge dans les grottes des Bausses, des cavités naturelles creusées dans le tuf calcaire des falaises surplombant l’actuel quartier littoral de Bouzigues, où se trouvent aujourd’hui plusieurs restaurants. Pendant plusieurs siècles, ces habitants vivaient essentiellement de la mer et de l’étang, ignorant les ressources terrestres. Ils ne cultivaient pas la terre, se contentant de prélever du bois pour le chauffage, des manches pour leurs outils, et de cueillir des fruits sauvages pour compléter leur alimentation basée principalement sur la pêche.

L’Émergence de la Viticulture et la Transformation du Village

Ce n’est qu’à partir des XIVe et XVe siècles que Bouzigues voit apparaître ses premiers défricheurs, des pionniers qui transformeront progressivement la terre en vignes. Ce mouvement agricole marquera un tournant décisif dans l’histoire de la commune. Les pêcheurs eux-mêmes se joindront à cet élan de défrichement, cultivant de petits lopins de terre pour planter des vignes, une pratique qui perdurera jusqu’aux années 1960.

Pendant de longues décennies, Bouzigues prospérera grâce à la pêche et à la viticulture. Le village se divise alors en deux zones distinctes : au nord, les demeures cossues des vignerons témoignent de leur relative aisance, tandis qu’au sud, les modestes maisons des pêcheurs bordent l’étang. Cependant, avec le temps, la culture de la vigne déclinera, laissant place à une urbanisation croissante.

La Conchyliculture : Une Révolution au Siècle Dernier

L’évolution majeure de Bouzigues intervient au début du XXe siècle, avec l’apparition des premières activités de conchyliculture. Entre 1907 et 1908, un petit groupe de pêcheurs entreprend les premières tentatives d’élevage d’huîtres et de moules dans l’étang de Thau. Ces pionniers mettent en commun leurs connaissances pour développer un mode d’élevage unique au monde à cette époque, qui suscitera plus tard l’intérêt international et sera reproduit dans d’autres pays.

Après la Seconde Guerre mondiale, la conchyliculture connaît un véritable essor. Progressivement, les pêcheurs de Bouzigues se tournent vers ce nouveau métier, combinant pêche et élevage de coquillages. Tandis que certains abandonnent définitivement la pêche pour se consacrer à la conchyliculture, d’autres, plus attachés aux traditions, continuent la pêche à la clovisse (palourde) et aux autres coquillages, utilisant des filets tels que les capejades et les brandines pour capturer bars, dorades et anguilles.

Bouzigues : D’un Port de Commerce à un Port de Plaisance

Le port de Bouzigues a lui aussi connu de nombreuses transformations au fil des siècles. Sa création remonte à 1670, et il est officiellement inauguré avec l’entrée du premier vaisseau le 15 mai 1702. Initialement conçu comme un port de commerce, Bouzigues se transforme successivement en port de pêche, en port de conchyliculture et, enfin, en port de plaisance.

La Naissance d’un Port de Commerce

En 1670, Timothée de Geoffroy cède à la commune de Bouzigues un terrain en vue de la création d’un port. En échange, il reçoit une rente annuelle de deux poulets, une anecdote pittoresque rapportée par Jean Brel, co-auteur du livre Raconte-moi Bouzigues. En 1687, l’état officiel mentionne que ce terrain est désormais cédé pour l’usage annuel d’un œillet blanc, illustrant les modestes débuts de ce port naissant.

Étape 1 : Les Premières Infrastructures (1671)

Dès 1671, une muraille est construite, servant de premier quai. Ce mur sera plus tard détruit pour laisser place à une balustrade, située aujourd’hui sur la place du Général de Gaulle (anciennement place du Port). Tous les Bouziguauds, riches et pauvres, participent à l’effort collectif pour édifier ce quai, qui devient le centre névralgique des échanges commerciaux de la commune, avec notamment le transit de barriques et tonneaux de vin. Cependant, ce premier quai souffre d’un manque de protection contre le vent marin.

Étape 2 : Les Jetées et le Port des Nacelles (1682)

En 1682, Bouzigues entreprend la construction de deux jetées, à l’est et à l’ouest du port, qui seront prolongées et renforcées une décennie plus tard. Ces nouvelles digues créent le port des nacelles, petites embarcations sans mât ni voile, dédiées à la pêche. Dans le même temps, des ateliers de foudriers, ou tonneliers, sont édifiés à proximité, renforçant l’activité économique liée au commerce du vin.

Un événement marquant pour Bouzigues se produit le 15 mai 1702 avec l’entrée du premier « vaisseau » au port. Cet événement est célébré par une fête, au cours de laquelle le capitaine du bateau reçoit un muid (600 litres) de vin, signe de l’importance de ce port pour la communauté locale.

Étape 3 : L’Extension et la Mutation du Port (1820)

En 1820, la mairie décide de combler l’ancien port et d’avancer les terres dans l’étang, ce qui génère des revenus substantiels pour la commune. Ces nouvelles terres sont vendues aux enchères à des particuliers et des entreprises, qui y installent des hangars et des fabriques de foudres. Les bénéfices de ces ventes sont réinvestis dans les travaux d’amélioration du nouveau port. L’introduction des cuves en métal ou en ciment dans les décennies suivantes entraînera l’abandon des foudres, et ces parcelles seront progressivement transformées en terrains résidentiels. Encore aujourd’hui, certaines maisons sur pilotis témoignent de cette période de transformation.

Dans les années 1840, les jetées subissent de nouvelles prolongations, marquant la fin des grands travaux d’infrastructure du port. Le commerce laisse alors progressivement la place à la pêche et à la conchyliculture au début du XXe siècle, avant de se tourner vers le tourisme et la plaisance après la Seconde Guerre mondiale.

Étape 4 : L’Émergence du Port de Plaisance (1975)

L’essor de la plaisance dans les années 1970 entraîne un nouveau développement du port de Bouzigues. En 1975, un important curage des eaux portuaires est entrepris pour accueillir des embarcations de plaisance, nécessitant un tirant d’eau de 1,5 à 2 mètres. Le port de plaisance voit officiellement le jour cette année-là, avec une capacité de 80 anneaux, et la jetée ouest permet d’accueillir une dizaine de pénichettes. Aujourd’hui, Bouzigues est un port apprécié des marins d’eau douce, qui, au fil des canaux, trouvent ici un havre de tranquillité au bord de l’étang de Thau.

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La raccommodeuse de filets à Bouzigues… qui patiemment, les unes après les autres, reprenait les mailles d’un filet et inscrivait ses gestes dans la longue tradition des peuples côtiers méditerranéens, de ces laboureurs de la mer qui ont construit l’identité magique et mystérieuse du Bassin de Thau…


Bouzigues Aujourd’hui : Un Héritage Vivant

Bouzigues continue de cultiver son identité unique, mêlant traditions séculaires et modernité. Le village est aujourd’hui une destination prisée pour sa conchyliculture renommée, ses restaurants en bord d’étang, et son ambiance conviviale. Avec son port pittoresque, ses ruelles bordées de maisons traditionnelles, et son riche patrimoine, Bouzigues incarne le charme intemporel des villages du sud de la France, où la mer et la terre s’unissent pour offrir le meilleur de la culture héraultaise. À moins d’une heure de Montpellier, Bouzigues est une invitation à ralentir, à savourer et à découvrir l’authenticité d’un village qui a su préserver son âme à travers les siècles.

Après des études en science politique et en géographie et histoire de l'urbanisme, Fabrice Bertrand, né à Montpellier, anime depuis 2016 le groupe Facebook "Montpellier Histoire et Patrimoine" qui compte près de 30.000 membres. Il est aujourd'hui en charge de plusieurs projets, qui visent à mettre en valeur le patrimoine scientifique et intellectuel montpelliérain.

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